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Humanisons l’humanité

Quelle prétention, quelle incongruité, quelle naïveté que ce titre… Peut-être ! Et alors, trouvons-nous dans la Cité d’aujourd’hui, celle des citoyens, que l’humanisme règne dans les esprits et donne ce supplément d’âme à notre peuple ?

L’histoire de l’humanité est tourmentée par toutes les guerres déclarées par ceux qui ont le pouvoir parfois la cupidité ou l’avidité. L’humanité est une histoire de conquête incessante de l’Homme contre l’Homme. La croyance de l’affrontement, de la compétition et du combat nous convainc que c’est la seule façon de réussir voire de survivre.

L’Homme est-il donc voué à souffrir éternellement de ses maux ?

Probablement s’il ne cesse de commenter les livres d’histoire, de philosophie, de sociologie, de psychologie, d’anthropologie… sans prendre conscience que lui seul est responsable et peut décider de contrer cette force étrange qui le tire vers l’abîme. Commenter, éduquer sur les écrits historiques ne suffit pas à pénétrer les consciences individuelles et collectives pour choisir une autre voie et guérir l’Homme de ses maux. Pas même les débats stéréotypés d’une affligeante bassesse qui occupent le terrain médiatique. Pas même la tyrannie des experts qui confisquent les débats d’idées et les concertations.

L’histoire de l’Homme est une tragédie de sentiments et d’événements. Une tragédie immanente et transcendante. Une tragédie de l’Homme en son for intérieur et une tragédie de la relation entre les Hommes. L’art et la culture dans une esthétique et un style particulier donnent à cette tragédie une profondeur et une forme comme pour la soumettre à notre jugement. La souffrance mise en scène semble donner une énergie surhumaine à une épreuve inhumaine dans des tableaux flamboyants ou des allégories. Mais rien n’y fait. Le peuple porte toujours un lourd tribut à l’errance de quelques Hommes de pouvoir qui se sont imposés à lui ou que lui même a choisi.

Comme un être impotent, le peuple est soumis à ses propres faiblesses. Il n’arrive pas à trouver le chemin de l’humanisme qui lui offrirait épanouissement et bonheur. Un chemin qui le sortirait de l’ornière des jeux de pouvoir.

Tout porte à croire que l’Homme n’est pas fait pour assumer le pouvoir. S’il le détient, il n’a de cesse de le défendre, de l’élargir ou d’en abuser. Pouvoir et humanisme seraient donc comme des contraires qui ne peuvent cohabiter ? Le pouvoir est une domination d’un être sur un autre, une relation humaine dénuée parfois d’humanisme.

Alors, pourrions-nous imaginer une cohabitation raisonnée, sans forme de pouvoir exclusif ou de domination, pour que le peuple vive en harmonie et assume sa destinée ?

Si l’Homme ne peut se départir du pouvoir pour garantir l’ordre et l’harmonie, peut-être pourrait-il en envisager une autre forme ? Celle du pouvoir de la bienveillance pour reconquérir ses vertus et son altruisme inné. Un nouveau pouvoir pour inspirer, rassembler et soutenir l’humanité dans son évolution. Cela suppose un nouveau mode de gouvernance plus participatif et plus coopératif pour agir ensemble en harmonie dans le respect des différences. Un mode de gouvernance qui unit les Hommes dans des schémas de complémentarité et de collaboration pour le bien de l’humanité. Un mode de gouvernance qui ne donne aucune matière aux jeux de pouvoir parce que réussir n’est pas conquérir. Réussir c’est faire le bien, travailler pour grandir…  Une utopie pour les uns, un espoir pour d’autres.

Les femmes et les hommes de toutes conditions ont le droit à une vie sociale juste, organisée par une politique utile qui fait le bien. C’est le sens des droits de l’Homme moderne qui incluent le droit social et une attente légitime des citoyens.

Pourtant, le système politique a cédé, parfois malgré lui, à la dérégulation, cède, encore, aux divers lobbying et aux gigantismes, et s’abandonne aux abus de pouvoir y compris les siens dans certaines régions du monde. Le système financier a pris le pouvoir sur l’économie réelle par la mise en place de dispositifs spéculatifs en tout genre à l’échelle planétaire.

Ces systèmes sont sous l’influence, à l’échelle mondiale, de la cupidité et de l’avidité de certains Hommes sans scrupule qui ne cherchent ni à faire le bien, ni à être utiles et ni à être justes.

Alors que pouvons-nous faire ? Sommes-nous condamnés à subir ces systèmes et le pouvoir de ces Hommes ? Sommes-nous faibles à ce point ?

Quand les systèmes s’effondrent, les conséquences aux formes multiples, faillites financières, perte d’emplois, guerres, surimpositions… pèsent essentiellement sur les peuples. Alors, il revient au peuple de prendre l’initiative et d’instaurer une nouvelle forme de gouvernance et un mode de fonctionnement juste, utile et humaniste. La démocratie dans sa forme actuelle n’a ni permis de prévenir ces dérives, ni permis de les corriger et ce dans aucune société. Elle a montré son utilité et son intérêt dans l’émergence de nos pays développés, mais elle montre aujourd’hui sa faiblesse et ses limites. Nous pâtissons de ce dispositif et éprouvons toutes les difficultés pour sortir des systèmes à haut risque. Aucune mise en garde, aucune lecture de notre histoire récente, aucun vote n’est suffisamment fort pour lancer la réforme de nos systèmes.

Seule une action forte du peuple, sans un « chef » mais avec des leaders d’inspiration, d’action, des animateurs, aura raison de ces dérives. Une action forte du peuple de raison, de tous ceux qui ont l’audace d’agir ensemble avec bienveillance pour construire le meilleur pour notre humanité. Un ensemble d’individus qui œuvre pour une cause qui les dépasse parce qu’elle est à l’échelle de la Cité et de l’humanité. Des individus qui ne cherchent pas le pouvoir mais qui œuvrent à l’émergence d’une société et d’une politique nouvelle avec une démocratie refondée pour le bien commun. Des individus qui écoutent et acceptent les différences pour trouver un chemin de convergence dans le respect de chacun. Des individus qui souhaitent demeurer à l’échelle humaine dans des systèmes justes, utiles et humanistes. Des individus qui n’agissent pas contre mais pour une cause, qui ne sont pas anti conformistes mais qui savent sortir des conformismes dans un esprit progressiste.

Alors le nouveau mode de fonctionnement est porté par cette vision et cette ambition d’humaniser l’humanité. Vouloir un monde meilleur, pour une vie meilleure pour nous tous, pour tous nos proches, pour notre famille et pour nos enfants.

Il ramène la finance à sa juste valeur, lui retire tous les champs de la spéculation qui détruisent tant de valeur et font souffrir tant de personne.

Il applique un principe de subsidiarité avec des régions culturelles pour responsabiliser, donner de l’autonomie, accompagner et servir les citoyens au plus près de leurs réalités économiques, sociales et territoriales.

Il concerte en continu le peuple sur les thématiques qui le concernent pour l’acculturer, utiliser l’intelligence collective et identifier les tendances qui guident son évolution.

Il éduque les citoyens dans un esprit ouvert et confraternel dans une dynamique de progrès en travaillant sur les dimensions humaines, sur l’émergence de tous les talents dans des espaces libres de découverte et d’expression.

Il co-décide dans l’intérêt commun et avec son peuple du devenir.

Il assure la cohésion entre la Cité, la région, la nation, l’Europe et le monde avec justesse.

Il crée des espaces d’expression et de concertation fiables, transparents et progressistes.

Il instaure une gouvernance populaire par des assemblées citoyennes responsables de synthétiser, de rendre réaliste et de faire adopter par le peuple les tendances et idées d’évolution.

Il met en place un système opérationnel de corps intermédiaires animé à l’échelle des régions, de la nation et de l’Europe pour traduire les évolutions souhaitées par le peuple dans la gestion des territoires.

Il fait preuve d’agilité et de réactivité avec un engagement sur la performance et les résultats collectifs en tenant compte de ses ressources limitées.

Il responsabilise le peuple, donne du sens et libère les initiatives.

Il se dote d’une justice lucide du peuple et de la raison qui ne se cache pas derrière le voile de l’ignorance.

Il ne tolère aucun échange qui renforce les injustices avec des peuples en souffrance mais prône la réciprocité.

La restauration de la confiance est le plus grand défi à relever. Un défi collectif qui nous engage tous à titre individuel. Nous avons l’histoire avec nous mais ne faisons aucune analogie qui détériorerait le courant novateur qui est en train de naître. Ne laissons aucun chef ou courant conformiste récupérer cette dynamique portée par le peuple pour le peuple, soyons solidaires et entraidons-nous.

D’aucuns verront dans ces propos de la théorie ou de la philosophie. C’est sûrement le cas, mais ce sont aussi des éléments fondateurs qui, si nous voulons bien en prendre conscience, pourront nous permettre de vivre autrement. N’oublions pas que les grands changements, les grands bouleversements, sont arrivés pour la plupart d’un petit groupe d’individus. Nous devons y croire, nous devons enrichir ce mouvement de nos convictions et de nos idées. C’est ainsi qu’il sera l’œuvre de tous ou d’une majorité d’entre nous. Ne cédons plus à la dictature des petits groupes extrémistes qui n’ont de vision que le désordre qu’ils apportent. Ne cherchons pas l’idéal mais cherchons à construire mieux ensemble de manière juste et équitable en acceptant les différences raisonnables. Soyons offensifs et osons changer le monde parce que la vie doit être un émerveillement et pas une souffrance, parce que notre planète, si nous la respectons, nous en donne les moyens.

Le mouvement des gilets jaunes est simplement la partie émergée d’une souffrance du peuple français qui se trouve pourtant dans un pays « développé ». La France n’est pas le centre du monde mais elle peut soutenir un mouvement d’humanisation de l’humanité. Une forme d’inspiration et de rassemblement des peuples pour transformer la gouvernance des nations à l’échelle mondiale.

Les causes et les raisons de la souffrance planétaire sans être comparables, se coagulent et pourraient donner de la force à un mouvement social citoyen inédit. Inédit par la forme, par le fond, par l’espace et par son rapport au temps.

Il n’y a pas une démagogie populiste parce que ce sont les peuples qui réclament autre chose. Il est temps de sortir des conformismes, d’abandonner les conservatismes et de refonder des systèmes plus adaptés à notre civilisation pour lancer une nouvelle ère. Une façon de redonner du sens à l’humanité !

Parce que demain se gagne aujourd’hui, rendons possible ce qui nous paraît impossible !

Les convictions d’un citoyen parmi les autres.

Thierry Pédeloup